DOSSIER: Violences sexuelles sur mineur·e·s: briser le tabou!
Lundi 18 février 2019
«Les violences sexuelles font partie des violences les plus impensables et les plus impensées. De toutes les violences, les violences contre les enfants sont certainement les plus cachées». Muriel Salmona, psychiatre, spécialisée en psychotraumatologie.
Dans une interview réalisée en novembre dernier, Andrea Bescond, la réalisatrice du film Les Chatouilles, expliquait: «Quand on est violé dans l’enfance, on est déshumanisé, on est comme anesthésié en fait. Au début, quand je n’avais pas conscience de tout ça, j’avais besoin d’aller au bout, à l’extrême de ma vie pour comprendre que j’étais en vie. J’avais besoin de me faire peur, de me faire mal, de faire mal aux autres. Après j’ai compris, grâce à une analyse, que ces comportements à risque étaient tout à fait normaux, parce que j’avais besoin de me sentir vivante. Parce que j’étais morte à l’intérieur. Une morte vivante. Ce qui m’a le plus surpris après dans mon parcours, c’est de voir que la majorité des gens que j’ai rencontrés, qui ont vécu plus ou moins la même histoire que moi, ont ce même comportement à risques, ces mêmes addictions». En quelques mots sont évoqués les graves impacts sur la vie d’adulte, des violences sexuelles perpétrées pendant l’enfance. Selon l’association Mémoire traumatique[1] , le fait d’avoir subi des violences dans l’enfance est le principal déterminant de la santé; une agression sexuelle sur un·e mineur·e peut lui faire perdre jusqu’à 20 ans d’espérance de vie. Très loin d’être marginales, les chiffres des violences sexuelles sur mineur·e·s. donnent le tournis. Selon un rapport de l’Organisation mondiale de la Santé, datant de 2014, 20% des femmes et 5 à 10% des garçons[2] sont concerné·e·s.
Face à l’ampleur du phénomène, nous nous proposons donc d’apporter quelques informations, quelques pistes de réflexion, sans prétendre être exhaustif/ve·s, sur ce sujet très complexe. Nous reviendrons, dans un premier temps, sur la prise en compte progressive, ces deux derniers siècles, des violences sexuelles sur mineur·e·s dans le débat public et dans les espaces professionnels qui œuvrent autour de l’enfance. Un deuxième article s’attachera à remettre en question les différent mythes et croyances qui entourent ces violences: figure du pédophile, chiffres, causes... À travers les écrits de la psychiatre Muriel Salmona, nous aborderons ensuite les mécanismes de survie neurobiologiques et les impacts psychotraumatiques des violences sexuelles. Enfin, alors que l’on sait que 90% des victimes d’inceste ne portent pas plainte, nous reviendrons sur la difficulté pour les personnes ayant vécu des agressions sexuelles de se faire entendre aujourd’hui par la justice. Ainsi, nous espérons que ce dossier permettra de mieux appréhender la violence à l’égard des enfants, qui selon l’OMS: «est un problème de santé publique, de droits humains et de société, avec des conséquences potentiellement dévastatrices et coûteuses, dont les effets destructeurs nuisent aux enfants de tous les pays, touchant les familles, les communautés et les nations».
SOMMAIRE DU DOSSIER: Violences sexuelles sur mineur·e·s: briser le tabou!
Violences sexuelles sur mineur·e·s: briser le tabou! L’enfant et les violences sexuelles En finir avec les préjugés Le cerveau face aux violences sexuelles Plainte pour viol: un processus éprouvant Pour aller plus loin [1] Association pour la formation, l’information et la recherche sur les conséquences psychotraumatiques des violences. [2] Rapport de l’OMS rendu public en 2014.