Dernière chronique (inter)culturelle avant la prochaine: Réflexion sur les valeurs à travers les cultures
Mardi 24 octobre 2023
Lors d’une séance de réflexion collective sur la rédaction d’un règlement d’ordre intérieur, au sein d’un groupe très multiculturel, il nous fut particulièrement compliqué de définir les valeurs. Or, il semblait évident que chacun s’engage à respecter, à ne pas violenter, à être bienveillant.
Que signifie le respect? A force de discussions, je notais que ma vision du respect ne correspondait pas du tout à celle de mon camarade plus réservé, pour qui une question de l’ordre «As-tu des enfants?» était vue comme irrespectueuse. Alors, comment envisager un cadre commun?
Selon Le Robert, le respect se définit comme «le sentiment qui porte à accorder à quelqu’un de la considération en raison de la valeur qu’on lui reconnait». Il semble ensuite indispensable de pouvoir comprendre ce qu’est la considération: «1. Motif, raison que l’on considère pour agir. 2. Fait de considérer, d’envisager». Débrouillons-nous avec ça… Mais n’y aurait-il donc aucune croisée commune? Un espace où chacun·e, quelle que soit sa culture, se sentirait respecté·e et considéré·e?
La solution s’est trouvée en sortant de l’aspect abstrait des valeurs et en se focalisant sur des faits, des comportements concrets. Au lieu d’utiliser la formule «respecter les autres», définir plutôt ce que l’on met collectivement derrière ce concept comme «ne pas couper la parole de celui ou celle qui parle», «demander la parole par un geste», «sortir pour répondre à un appel urgent», etc. Mais de manière plus générale, pour vivre en collectivité, ne serait-il pas davantage de bon ton de fonctionner de cette manière?
Les personnes qui prennent les transports en commun à Bruxelles savent à quel point cet espace collectif est régulièrement soumis à des problèmes de valeurs communes. Pour moi, écouter quelqu’un parler au téléphone en haut-parleur est tout bonnement insupportable et impossible à vivre si tout le monde l’applique en même temps. Il me semble aussi évident que l’on ne se jette pas sur un siège avant d’avoir observé si une personne moins jeune, plus vulnérable n’en a pas besoin. Pourtant, je ne doute pas une seconde de la bonne foi de tous! Les autres, comme moi, sont sans doute animés de bonnes intentions quant à la vie en collectivité. De même, je prône sincèrement l’éducation bienveillante, mais suis-je obligée de boire un café entourée d’enfants hurlants? La grande mode des cafés «kids friendly» impose pourtant le plus souvent ce genre d’ambiance…
La vie en collectivité est compliquée et demande de réajuster sans cesse ses propres convictions en faisant preuve d’une réelle empathie, donc à être capable de s’identifier à autrui dans son ressenti. C’est d’autant plus compliqué que Bruxelles est l’une des villes les plus cosmopolites du monde et mes valeurs peuvent s’illustrer d’une manière très différente d’une personne issue d’une tout autre culture. Mais le jeu en vaut la chandelle, j’en suis profondément convaincue, et comme l’exprime si bien l’Unesco: « La diversité culturelle est une force motrice du développement et un atout indispensable pour atténuer la pauvreté et parvenir au développement durable».
Photo: © Archie Binamira / Pexels