Osons parler vieillesse: Galerie de portraits / Le plein d’émotions

Jeudi 15 juin 2023

Marie-Francoise Holemans, secteur communication Ligue de l'Enseignement

Qui sont les personnes âgées qui ont un pied bien planté dans la société? Quelles sont celles qui ont besoin d’aide? Qui les guide et les accompagne? Il y avait un moyen très empirique de le savoir: partir à leur rencontre, discuter de leur projet et revenir… le regard profondément enrichi.

L’ordre des rencontres est aléatoire. C’est celui des disponibilités, dans des agendas bien chargés. Le choix des parcours est lui-même le fruit de relations, de recommandations ou d’une certaine notoriété. Cette galerie de portraits se veut le reflet de la multiplicité des initiatives qui visent à rendre plus visibles les personnes âgées, elles qui constituent le quart de la population! Les projets qui accompagnent et valorisent les seniors foisonnent, en particulier ceux qui créent des liens intergénérationnels et qui participent, par leur action, à repousser les clichés, démonter les stéréotypes et favoriser un monde plus respectueux de toutes les générations.
L'angle choisi est positif. Non pour gommer les difficultés – bien réelles d’isolement, de précarité, de logement, de santé mentale ou d’autonomie physique – mais pour servir de source d’inspiration et favoriser un autre regard sur les aîné·es. Car dans la vieillesse, il y a aussi cette soif de vie et d’accomplissement, directement liée au temps retrouvé et à l’épanouissement procuré par l’action et l’engagement. N’étant plus soumises aux contraintes de la vie active, les personnes âgées retrouvent un espace de liberté et font preuve d’une grande créativité pour accorder leurs réalisations à leurs aspirations profondes.
Seniors ou non, bénévoles ou rémunérées, les personnes rencontrées sont très actives, profondément animées et inspirantes. Elles tiennent un rôle important, précieux pour la société. S’il y avait une pelote de fil rouge à dérouler de ces rencontres, ce serait celle du lien, de la transmission, de la solidarité, du sens et, souvent, de la fierté d’apporter une contribution à cette galerie. En clôture d’entretien, chacune, chacun a délivré son conseil aux personnes âgées ou à celles qui ont de grandes chances de le devenir un jour.

BABBELBIKE
Les balades à vélo créatrices de sourires

  • Le projet
Babelbike

La toute jeune association BabbelBike propose des moments de partage intergénérationnel qui permettent de babbeler, papoter, tout en participant à une belle activité à vélo dans les endroits verts de Bruxelles (Bois de la Cambre, Promenade Verte, parcs, etc.) Le principe? Des bénévoles de tous âges viennent chercher, avec leurs vélos tricycles adaptés, des personnes à mobilité réduite, qu’elles le soient à cause de leur âge, de leur maladie ou de leur handicap, pour leur faire prendre le grand air, partager un moment de détente et tisser du lien. Car les objectifs multiples de ces rencontres sont de permettre à ces personnes de rompre l’isolement, de retrouver une dignité et d’être reconnues dans leurs capacités, tout en respectant une démarche de mobilité douce, bienfaitrice pour la santé physique et mentale des pédaleuses et pédaleurs comme des personnes baladées.

  • La rencontre

Béné et Pierre Visart portaient déjà un projet d’inclusion numérique dans leur cœur et leurs cartons, lorsqu’un grave accident brisa leur élan, rendant Béné tétraplégique. Une longue rééducation s’est ensuivie, obligeant Pierre à interrompre sa carrière professionnelle. Au hasard d’un jogging à l’hippodrome de Boitsfort, il rencontre un loueur de vélos adaptés PMR et il propose un petit tour à Béné. A l’évocation de cette balade, Béné affiche un immense sourire: «Ce jour-là, j’ai pensé: même si je ne peux plus jamais marcher, au moins je peux aller me promener avec mon mari». L’idée de l’association était née.
Six mois après sa fondation, ce sont déjà 80 bénévoles âgé·es de 20 à 76 ans qui pédalent pour le bonheur des personnes qui ne peuvent le faire elles-mêmes, majoritairement des seniors vivant en maison de repos. Gages d’ambiance et de convivialité, les sorties en groupe sont privilégiées, à l’aide de plusieurs types de vélos: le tricycle à banquette de style rickshaw, le tandem tricycle et le tricycle à deux pignons permettant au senior de retrouver le plaisir de pédaler en toute sécurité, et enfin le tricycle à plateau PMR.
«Ça décoiffe, super, super!», s’exclame l’une des personnes baladées, rayonnante. Et si la météo freine les moins téméraires, en une trentaine de sorties, 100% des bénéficiaires ont été satisfait·es de «retourner sur un vélo» et retrouver les sensations de leurs 20 ans. «Nous proposons aux personnes isolées autre chose que du bingo et des quizz, nous sommes des créateurs de sourires!», conclut Pierre, enchanté lui aussi.

  • Le conseil: «Osez sortir, même s’il fait mauvais!»

Plus d'infos: https://www.babbelbike.be

1TOIT 2ÂGES
L’habitat en binôme intergénérationnel

  • Le projet
Toit2Ages

L’idée d’1Toit 2Âges repose sur l’idée en apparence toute simple de réunir, dans un même logement, deux générations: un·e étudiant·e et une personne âgée. La cohabitation peut durer le temps des études, moyennant une participation financière variable en fonction de la formule choisie (avec ou sans services à la personne âgée) et la signature d’une convention engageant chaque partie à occuper les lieux de façon paisible. Chacun·e y trouve de multiples avantages: pour le/la jeune, une chambre à prix abordable et une compagnie bienveillante; pour le/la senior, une présence agréable, une sécurité et un complément de revenus. Mais le premier atout de cet habitat intergénérationnel, c’est bien sûr la création de liens qui se poursuivent souvent bien au-delà des études. En 14 ans d’existence, plus de 4000 binômes ont été créés à Bruxelles et dans plusieurs villes wallonnes. Et s’il fallait des preuves du succès de la formule, les voici: 71% des étudiant·es réussissent en première session et 98% des seniors recommandent 1Toit 2Âges!

  • La rencontre

Claire de Kerautem a fondé 1Toit 2Âges à une époque où le taux d’occupation des maisons de repos atteignait la saturation. De 12 binômes en 2009, l’association est passée à 566 cette année. «Nous souhaitions aider les jeunes à vivre dans un logement de qualité à prix accessible et, parallèlement, nous voulions lutter contre l’isolement des personnes âgées et leur permettre de rester à domicile le plus longtemps possible», explique Claire. Une formule gagnante à tout point de vue: les étudiant·es et leurs parents sont rassurés, les seniors et leurs enfants aussi, et l’Inami fait des économies: «Ce type d’habitat soulage les familles, mais en aucun cas les jeunes ne sont des garde-malades. Toutefois, nous constatons qu’au fil du temps, les accueillant·es consomment moins de médicaments et que leur état de santé général s’améliore, ils et elles rajeunissent!»
Si la chambre et éventuellement la salle d’eau sont individuelles, la cuisine est partagée: c’est un lieu de rencontre et il n’y a aucune obligation d’assurer le repas de l’autre, même si l’idée est de le partager. «Les critères de réussite de nos binômes reposent sur l’envie personnelle – j’insiste – de venir ou d’accueillir, sur la volonté d’apprendre et de transmettre, sur la proximité géographique pour les familles et sur les affinités. Un étudiant en musique habitera chez une personne qui dispose d’un piano par exemple ou une étudiante en logopédie sera logée chez une ancienne professeure de français».
Claire nous explique que son équipe pluridisciplinaire visite chaque candidat·e individuellement, établit la sélection et étudie le meilleur binôme. L’association assure un suivi toute l’année et organise de nombreuses activités comme des dîners intergénérationnels, des sorties au musée et au théâtre ou encore des journées à la plage. «Héberger un jeune chez soi, pour autant que l’on cultive une curiosité pour l’autre, est assurément un moyen de rester jeune soi-même. Si la moyenne d’âge de nos seniors est de 73 ans, notre doyenne a 101 ans!», conclut-elle avec une grande fierté.

  • Le conseil: «Ouvrez votre porte, tout un cadre existe pour que cela se passe bien!»

Plus d'infos: www.1toit2ages.be

OXFAM-MAGASINS DU MONDE
Le bénévolat au service du Sud

  • Le projet
Oxfam

Oxfam-Magasins du monde est un mouvement citoyen international qui fonde son action sur la justice socioéconomique. Depuis sa fondation en Grande-Bretagne durant la Seconde Guerre mondiale, l’Oxford Committee for Famine Relief (Oxfam) n’a cessé de combattre les inégalités et les injustices, dénonçant les pratiques inéquitables afin de rendre le système de production, de distribution et de consommation plus juste pour les populations du Nord et du Sud.
Concrètement, outre ses interpellations des décideurs politiques et des entreprises, l’ONG forme à la citoyenneté critique et responsable en menant des campagnes et des actions de sensibilisation pour un développement durable, social et solidaire. En Belgique, elle organise notamment les petits-déjeuners Oxfam avec des produits issus du commerce équitable, elle dispense des formations dans les écoles et propose des expérimentations comme la Fresque du climat. Elle met aussi à disposition un large choix de supports d’information (magazine FAIR, vidéos, analyses et études) et pas moins de 120 outils pédagogiques.
En cohérence avec ses missions, Oxfam propose des alternatives équitables et solidaires dans ses Magasins du monde, où sont vendus des produits du commerce équitable du Sud comme du Nord, ainsi que des vêtements de seconde main. Pour ce faire, elle s’appuie sur un important réseau de bénévoles, dont une majorité de personnes pensionnées.

  • La rencontre

Jeannine Vanhumbeeck est chargée du recrutement des bénévoles au magasin Oxfam Bailli à Bruxelles. Après une vie professionnelle bien remplie de professeure de mathématiques puis de directrice dans l’enseignement, elle se refusait à l’inaction sous prétexte que l’âge de la retraite avait sonné. Guidée par le sens du service – un engagement familial ancré de longue date – Jeannine est entrée chez Oxfam pour y rejoindre sa sœur. Vingt ans plus tard, son engagement pour la cause est resté intact.
«J’ai vécu dans une famille nombreuse et accueillante, avec des parents toujours prêts à rendre service et à héberger des jeunes. Ils nous ont transmis ces valeurs d’ouverture et de soutien aux autres, pratiquées dès le scoutisme puis dans la vie adulte. J’ai eu l’occasion de beaucoup voyager et de rencontrer des cultures très différentes de la mienne, notamment au Mali et au Rwanda», explique Jeannine à propos de son parcours. Le travail au magasin consiste à vendre des produits d’épicerie et d’artisanat principalement en provenance des pays en développement, selon une charte qui veille au respect de bonnes conditions de travail et d’une rémunération juste.
«Tout en transmettant ces valeurs d’aide aux pays du Sud, le bénévolat chez Oxfam me permet de rester dans la vie active, de rompre mon isolement et surtout de faire de nouvelles connaissances. Je suis toujours en contact avec d’anciens bénévoles en Colombie, en Italie et au Canada! Cette activité me permet sans doute de rester en bonne santé car je marche beaucoup et reste tout le temps debout. Si un·e bénévole est moins efficace que d’autres, il ou elle n’est pourtant à blâmer, car cela peut lui faire du bien de venir travailler, c’est une dimension sociale à ne pas négliger».
Le secret de la jeunesse pour Jeannine? «On reste jeune quand on a le projet de rester dans le coup toute sa vie. Il faut continuer à se former, rester éveillé·e aux problèmes du monde, s’entourer de jeunes et entretenir sa condition physique».

  • Le conseil: «Restez dans l’action!»

Plus d'infos: https://oxfammagasinsdumonde.be

CEPULB
L’université à tout âge

  • Le projet
CEPULB

Créé il y a bientôt 50 ans, le Conseil de l’Education permanente de l’Université libre de Bruxelles (CEPULB) est l’une des premières universités ouvertes à toutes et tous, sans distinction d’âge ou de diplôme. Cette Université Inter-Âges, comme elle se qualifie aujourd’hui, propose des activités dans une démarche progressiste, proche des transformations du monde et de l’évolution des sciences, pour permettre à ses membres de se forger une opinion citoyenne dans une société où tout se complexifie.
La diffusion de connaissances, basées sur les derniers développements de la recherche et acquises en milieu universitaire par des enseignants-chercheurs ou des experts-spécialistes, est la mission principale du CEPULB. Elle s’adresse à des personnes désireuses d’enrichir leurs savoirs dans des domaines variés (santé, sciences, géopolitique, économie, histoire, etc.) tout en maintenant un lien social de qualité, qu'elles soient encore actives ou non dans la vie professionnelle, et cela dans un environnement intergénérationnel.
Afin de mettre le savoir universitaire actuel à la portée de tous, le CEPULB propose des cycles de conférences annuels, des cours facultaires avec les étudiant·es de l’ULB ou encore des découvertes scientifiques en tandem avec les petits-enfants. L’association organise aussi un large programme d’activités physiques et culturelles comme des balades à vélo guidées par des étudiant·es, des ateliers marche, des cours hebdomadaires de tai ji quan, yoga et gymnastique, ainsi que des ateliers narratifs, des excursions et voyages culturels, des visites d’expositions, sans compter la publication d’une revue trimestrielle, scientifique et culturelle, tirée à 6000 exemplaires.

  • La rencontre

Claude Boffa a la diffusion du savoir inscrite dans les gênes. Ancien formateur et professeur dans le supérieur, il est le nouveau président de l’Université Inter-Âges de l’ULB. Inscrit au CEPULB pour y suivre des cours facultaires de latin en compagnie de jeunes étudiant·es, il s’est vite retrouvé à donner des conférences, à analyser les comptes de l’association suite au covid puis invité à les redresser. Il contribue ainsi à une organisation qui fonctionne grâce à l’implication de nombreux bénévoles et au travail intense de ses coordinatrices d’activités et de projets, dans le but de développer une offre de services culturels et sportifs adaptés aux seniors.
Aujourd’hui, ce sont 1500 membres à la moyenne d’âge de 71 ans qui fréquentent les bancs de l’université inter-âges bruxelloise. «Les personnes qui n’ont pas fait d’études peuvent ressentir le besoin et l’envie de se former. Parmi nos membres, la moitié sont des ancien·nes de l’ULB qui viennent rafraîchir leurs connaissances et découvrir de nouvelles sources de savoir, actuelles et variées. Pour les personnes qui ne peuvent se déplacer, nos 73 conférences annuelles sont diffusées en ligne et même en différé à partir de la rentrée académique prochaine, si bien que les retraité·es vivant à l’étranger n’ont plus aucune excuse! Nos conférences sont également proposées aux maisons de retraite afin de stimuler intellectuellement leurs résidents», nous détaille Claude.
Les professeur·es de l’ULB ont trois missions: la recherche, l’enseignement et le service à la communauté. C’est dans ce dernier cadre que sont données leurs conférences sur des sujets a priori ardus, mais elles sont souvent passionnantes car dispensées dans un format accessible aux non-initié·es. «La télévision rend sédentaire, même si on s’informe. ‘Mens sana in corpore sano’, il faut bouger! Si on ne garde plus l’esprit ouvert, si on ne s’intéresse plus à rien, on n’apprend plus et on n’a plus envie de partager. C’est l’étiolement… Tant qu’on découvre intellectuellement, on reste jeune. D’ailleurs, les inscriptions pour la prochaine rentrée sont ouvertes!»

  • Le conseil: «Bougez-vous et remuez vos neurones!»

Plus d'infos: https://cepulb.ulb.be

GÉNÉRATION+
Une commune senior friendly

  • Le projet

Génération+ est une asbl communale qui a pour mission de développer le lien entre et avec les seniors de la commune d’Uccle à Bruxelles. La dynamique association organise un large éventail d’activités à vivre en toute convivialité, en gardant pour principe la meilleure accessibilité financière possible ou la gratuité. L’organisation de ces activités nombreuses et variées repose sur l’expérience de l’équipe communale ainsi que sur l’engagement passionné de 80 personnes bénévoles, la plupart seniors elles aussi.
Moyennant un abonnement symbolique, les seniors reçoivent tous les deux mois le magazine G+ où sont annoncés les ateliers, conférences, excursions, visites guidées, marches et autres animations, comme des cours de sport adaptés, des ateliers culinaires, des cours de théâtre ou des formations à l’informatique. A côté de cet imposant programme, le magazine aborde des thèmes portant sur des évolutions de la société qui touchent les seniors dans leur quotidien, avec les témoignages de différentes générations uccloises au travers d’interviews croisées. Une rubrique Pages Libres se veut participative et accueille des textes de lecteurs et lectrices au sujet d’une anecdote sur le passé de la commune, d’une passion ou d’un coup de cœur à partager.
Pour les personnes âgées en quête d’apprentissage, de nouvelles rencontres et de bien-être, la plupart des activités sont récurrentes et adaptées à leur âge. Elles favorisent les liens entre les aîné·es mais aussi entre les générations, notamment dans le cadre de journées d’échanges avec des écoles et lors des mardis gourmands organisés par l’asbl Bras dessus Bras dessous. Des séjours proches et accessibles sont également proposés, ainsi que des expériences gastronomiques ou musicales et dansantes.

  • La rencontre

Françoise Aubert est responsable du service Seniors actifs de la commune d’Uccle, un service relié aux Affaires culturelles et récréatives, ce qui indique la volonté de la commune d’intégrer les seniors à une vie sociale, active et instructive: «En théorie, nous nous adressons aux personnes de plus de 55 ans, mais en pratique, ce sont surtout des retraité·es qui fréquentent nos activités. Ces personnes disposent de plus de temps libre, elles sont généralement assez dynamiques et elles ont envie de bouger! S’il fallait résumer la démarche que nous proposons à nos 1700 abonnés, ce serait sortir, s’amuser, apprendre, tisser du lien. On donne du bonheur aux gens!»
Diplômée des Beaux-Arts et illustratrice de formation, Françoise s’implique avec enthousiasme dans cette offre multiple à l’adresse des aîné·es. «Cela nous motive à suivre l’actualité des expositions et à organiser des activités attractives qui réunissent le côté humain, social et culturel. Cette responsabilité nous oblige aussi à prendre en compte les difficultés des personnes âgées et à leur apporter des solutions, en particulier l’énorme fracture numérique: nous les invitons à se former dans nos EPN (espaces publics numériques) pour apprendre les bases de l’informatique ou à se perfectionner lors de sessions qui leur sont réservées», complète Françoise.
Sa vision sur la vieillesse est résolument positive: «Le temps qui passe fait peur mais si on a un état d’esprit jeune, on le garde. Il y a tant à découvrir et partager qu’il serait dommage de rester chez soi! En gardant le mental éveillé, on reste bien dans son corps. Et s’il se dégrade avec les années, cette perte d’autonomie physique est largement compensée par la maturité, l’expérience, le regard porté sur la richesse de son passé. Un recul sur les choses à partager avec les plus jeunes qui ont encore tout à découvrir!»

  • Le conseil: «Soyez curieux·se, allez vers les autres!»

Plus d'infos: https://www.uccle.be/fr/decouvrir-et-sortir/seniors-actifs/g-le-magazine-par-et-pour-les-seniors

ÂGES ET TRANSMISSIONS
La rencontre de deux publics

  • Le projet
Ages et transmissions

Active depuis plus de 25 ans à Bruxelles, l’association Âges et Transmissions promeut l'engagement des aîné·es dans la construction d’une société plus ouverte à toutes les générations et à toutes les cultures. Parmi ses actions, elle invite les seniors à des sensibilisations sur l’intergénération et sur l’interculturalité, sous forme de conférences et ciné-débats, lors d’ateliers lecture ou dans des groupes de réflexion sur des thématiques comme l’école, les parcours de migration ou le féminisme.
Grâce à l’association, les aîné·es ont la possibilité de valoriser leur utilité sociale dans une série de projets, comme les rencontres intergénérationnelles et interculturelles organisées avec des enfants, des adolescents ou des adultes d’origines variées afin de créer des échanges et tisser des liens. Les seniors peuvent notamment s’engager dans le soutien scolaire en lecture et français oral pour les enfants primo-arrivants, ou soutenir l’apprentissage de la lecture auprès d’adultes en parcours d’alphabétisation ou encore promouvoir l’oralité avec un public FLE (français langue étrangère).
Un intéressant axe de travail autour de la transmission de la mémoire invite les aîné·es à s’engager comme passeuses et passeurs de mémoire. Il vise à recueillir et transmettre des récits de vie, des témoignages, autant de clés pour comprendre le passé, éclairer le présent et construire l’avenir. Cela se traduit en multiples projets: des ateliers d’écriture autobiographique débouchant sur un recueil collectif sur une période ou un phénomène social marquant; des rencontres en groupe multiculturel d’adultes d’âges et horizons divers, axées sur le partage de leurs expériences de vie; et enfin des animations en classes de primaire pour raconter des souvenirs d’enfance et questionner les changements de la société.

  • La rencontre

Cathie van der Straten, ancienne collaboratrice au Musée des Enfants durant 30 ans, et Marie Dehou, psychologue, sont les porteuses du projet Mémoires pour demain. Des seniors rencontrent des enfants de la 4e à la 6e primaire pour leur raconter leur jeunesse avec, dans leur sac, des objets et des photos d’époque, mais aussi des anecdotes de vie permettant d’aborder les changements de la société belge de manière ludique.
«Notre premier public, ce sont les seniors, explique Cathie. Notre association, qui compte 300 membres, agit comme une courroie de transmission entre deux publics: des seniors d’une part et des enfants ou des adultes d’une culture différente d’autre part. Nous mettons tout le monde au travail! Notre thème actuel sur l’école d’autrefois invite à réfléchir à qui nous sommes, il répond à une demande des seniors qui désirent s’engager, et les enfants adorent car beaucoup sont issus de l’immigration et n’ont pas de figure aînée dans leur entourage proche. Le vécu des personnes âgées quand elles avaient leur âge les intéresse énormément».
Les bénévoles ne doivent pas nécessairement être expérimenté·es car l’équipe d’Âges et Transmissions les soutient dans la préparation et lors des binômes dans les classes. «Anecdotes amusantes, objets et jeux du passé, retours d’expériences suscités dans les familles sont les supports des trois rencontres successives, qui se clôturent par un débat, explique Marie. Dans un contexte d’école multiculturelle et multilingue, j’invite les seniors à accorder de la valeur à leurs souvenirs car ils traduisent notre Histoire et sont de riches outils de transmission».
«De plus en plus, je réalise que je suis la première bénéficiaire, conclut Cathie. Si les liens avec les enfants s’estompent vite, avec les adultes en revanche, on n’est jamais dans la banalité. D’une démarche qui peut sembler paternaliste au départ, l’échange devient rapidement bilatéral. Et il faut être prêt·e à revoir ses convictions».

  • Le conseil : «Apprêtez-vous à recevoir et à vous transformer!»

Plus d'infos: https://agesettransmissions.be

GANG DES VIEUX EN COLÈRE
Pour une fin de vie digne et heureuse

  • Le projet
Gang des Vieux en Colère

Le Gang des Vieux en Colère est un mouvement citoyen indépendant et transpartisan qui milite pour le droit de vieillir dans la dignité. Depuis sa première mobilisation en 2018, le mouvement s’est amplifié et compte désormais plus de 10.000 membres et sympathisant·es, pensionné·es, prépensionné·es et autres personnes concernées par la problématique des pensions de retraite et des conditions de vie des personnes âgées. Son noyau dur porte haut et fort, toujours sur le ton de l’humour, des revendications et des propositions en vue d’améliorer la qualité de vie à l’âge de la retraite.
Ses moyens d’action sont la dérision, les mises en scène, les manifestations – comme la Procession à Saint-Vioc ou l’enterrement de la sécurité sociale avec pleureuses, curé et corbillard – afin d’alerter sur les conditions de vie des personnes âgées, peu considérées dans la société et souvent malmenées. Grâce à ses actions coup de poing qui font rire et réfléchir, le mouvement gagne en visibilité dans les médias. Le Gang invite aussi à la réflexion dans son journal Old-Up, tiré à 10.000 exemplaires et diffusé gratuitement «à condition de ne pas s’en servir pour éplucher les patates».
Des actions de lobbying auprès des politiques relaient leurs revendications principalement axées sur une pension de retraite décente, garantie et égale dénommée «minimum pension-décente universel». Ce concept englobe notamment l’accès à la pension à 65 ans, la suppression du critère de carrière complète, la suppression de la GRAPA (l’allocation pour les plus de 65 ans qui ne disposent pas de ressources suffisantes), la suppression du statut de cohabitant, un relèvement des seuils de taxation des pensions et un accès aux soins de santé égal pour toutes et tous.
Dans ce combat qu’il affirme mener au bénéfice des générations futures – vu la lenteur des décisions politiques et des changements sociaux – le Gang des Vieux en Colère souhaite aussi la désignation d’un·e Délégué·e aux droits des seniors, qui serait en charge du contrôle de la qualité de vie dans les maisons de repos tant publiques que privées. Le mouvement revendique également une formation adaptée des personnels gériatriques, ainsi que l’instauration de critères qualitatifs obligatoires dans ces établissements en matière d’hygiène, de soins, d’alimentation, de sécurité et de bien-être.

  • La rencontre

Pierre Marage (alias Le Parrain) est retraité mais pas au repos. Ce physicien est aujourd’hui le porte-parole du mouvement et il se bat au quotidien contre les idées reçues: «Dans une société où tout doit rapporter, les vieilles et les vieux sont considéré·es comme un coût. Or les personnes âgées apportent une contribution importante à la société. Pensons par exemple au bénévolat, à la garde des petits-enfants, au soutien scolaire, à l’accompagnement d’autres personnes âgées. Si on comptabilisait tout ce travail non rémunéré dans le PIB, le regard porté sur elles serait totalement différent».
Le Gang s’est formé entre amis évoluant dans le milieu artistique, au départ du constat que l’un d’eux percevait une pension totalement insuffisante: «Nous utilisons les armes de l’humour et de la dérision pour parler de choses très sérieuses. Nous sommes en colère tout de même! Nous nous battons contre les injustices et les inégalités, contre la pauvreté et parfois la misère, contre la maltraitance physique et morale dans les maisons de repos et dans les familles, contre le niveau et l’avenir des pensions, contre la fracture numérique ou encore contre les contrôles humiliants afin de conserver la GRAPA. Ce climat de suspicion est semblable pour tous les allocataires sociaux, soupçonnés de fraude en permanence malgré leur situation difficile. Nous, vieux rigolos et pas amorphes, dénonçons cette mentalité et œuvrons pour que les vieilles et les vieux puissent mener une fin de vie digne et heureuse».

  • Le conseil: «Ne vous laissez pas faire et prenez la vie qui reste du bon côté!»

Plus d'infos: https://gangdesvieuxencolere.be

LE POT’ÂGÉ
Cultiver l’intergénération et la solidarité

  • Le projet
Pot'age

Le Pot'âgé de la maison de repos Résidence Reine Fabiola, située en bordure de Forêt de Soignes à Bruxelles, est un projet de potager urbain qui se veut convivial, intergénérationnel, biodiversifié et pédagogique. Il est ouvert aux résident·es et leur famille, au voisinage et aux élèves des écoles proches. A sa création en 2018, ce projet a bénéficié de l’appui d’associations partenaires telles Good Planet et Le Début des Haricots. Il comprend un espace naturel composé de quatre bacs potagers surélevés et adaptés aux besoins de mobilité des résident·es, d’un compost, de jardinières à aromates et d’un récupérateur d’eau de pluie. Quelques bancs viennent compléter les lieux pour en faire un espace d’agrément et de rencontre.
Pensé comme outil de sensibilisation à l’agriculture urbaine – des animations nature y ont déjà eu lieu – le jardin potager est d’abord un outil de convivialité et de stimulation pour la résidence, car les fruits et légumes cultivés et récoltés par les personnes âgées sont transformés lors d'ateliers de cuisine avec celles et ceux qui les ont vu pousser! Faire des semis dans les chambres, cultiver des chicons dans les caves, sortir et travailler la terre, planter, arroser, entretenir puis récolter permettent de se sentir en contact avec la nature et de s’épanouir sur le plan psychique et physique.
Au cœur de la ville, le Pot’âgé est aussi un lieu de biodiversité qui sert à des apprentissages variés – écocitoyenneté, respect de l’environnement, agriculture urbaine, alimentation saine et durable – et à la création de liens intergénérationnels, interculturels et solidaires à travers la réalisation d’un travail collectif qui nécessite écoute et respect mutuel.

  • La rencontre

Virginie Dumoulin est ergothérapeute à la Résidence Reine Fabiola. Aidée d’une spécialiste du maraîchage, c’est elle qui a pris la relève du projet après sa mise en place par une écoconseillère il y a cinq ans. Même si Virginie prétend ne pas avoir la main verte, elle est fière de présenter ses énormes choux rouges, ses beaux bouquets de persil et la liste impressionnante des ingrédients qui viennent alimenter ses ateliers de cuisine: «La nourriture est le sujet par excellence en maison de repos car la plupart du temps, la cuisine de collectivité déplaît. Avec les légumes de notre potager, les personnes âgées savent ce qu’il y a dans la soupe puisque ce sont elles qui la préparent! Notre local d’ergothérapie est équipé d’une cuisine et, après la récolte, nous procédons à l’épluchage et au nettoyage des légumes, nous cuisinons ensemble et ensuite nous savourons nos plats, souvent rejoint·es par d’autres résident·es car nous embaumons tout l’étage. Les dames retrouvent leurs gestes et les messieurs dégustent!»
Dynamique et motivante, Virginie les invite à sortir de leur chambre et à participer à cette activité créatrice de liens et de cohésion, à l’intérieur de la résidence comme à l’extérieur avec le voisinage: «Chacun·e s’implique à la mesure de ses envies et de ses moyens. Pendant que certain·es s’activent les mains dans la terre, d’autres prennent le soleil sur un banc ou viennent juste regarder l’évolution des cultures. Il y en a qui partagent fièrement leurs anciens outils et leurs connaissances, d’autres qui observent leurs semis en pédalant devant le bac à leds au local kiné. C’est une activité sociale qui rapproche les gens. Et pour les résident·es qui n’ont pas de famille et qui n’ont plus la possibilité de se déplacer, cultiver et cuisiner représentent un objectif complet à atteindre et parfois les seuls petits plaisirs qui leur restent».

  • Le conseil: «Ne restez pas seul·e!»

Plus d'infos: https://goodfood.brussels/fr/contributions/le-potage-de-la-residence-reine-fabiola

GRANDS-PARENTS POUR LE CLIMAT
Motiver à l’action individuelle et collective

  • Le projet
Grands-Parents pour le Climat

Bien avant la mobilisation que l’on connaît aujourd’hui et devant l’urgence des défis écologiques, une poignée de grands-parents décident de s’associer en fondant l’association Grands-Parents pour le Climat (GPC) en 2015. Soucieux de contribuer à transmettre à leurs petits-enfants un monde habitable et solidaire, ils multiplient les actions de sensibilisation, soutiennent les jeunes et les Youth for Climate lors des marches hebdomadaires de 2018, participent aux mobilisations du réseau Coalition Climat et interpellent les politiques, tout en adoptant un mode de vie en cohérence avec les valeurs qu’ils défendent.
Leur approche est singulière car elle est animée par l’amour qu’ils portent à leurs petits-enfants et l’inquiétude de leur laisser un monde dégradé, aux richesses naturelles et aux sociétés humaines menacées. Guidés par la question «Que laisserons-nous en héritage aux générations à venir?» et par un sentiment d’urgence, ces retraité·es mobilisent leur énergie pour soutenir les initiatives en faveur d’un mode de vie équitable et soutenable basé sur le respect, la solidarité, la justice sociale et une dynamique intergénérationnelle. Et c’est justement du fait de cette motivation générationnelle que leur discours retient l’attention et que leur notoriété s’étend en Europe.
Leur premier axe de sensibilisation est de proposer des solutions concrètes pour vivre plus sobrement. Consciemment, ils diminuent leur impact environnemental en choisissant des modes de production et de consommation plus écologiques, respectueux des limites de la planète. Un deuxième axe concerne la sensibilisation de deux publics: les juniors et les seniors. Une équipe de grands-parents se rend dans les classes de maternelle, primaire et secondaire avec des animations et des outils d’éducation à l’environnement pour transmettre aux jeunes le respect du monde vivant. La transmission vers les seniors se fait via des associations de seniors ou parfois dans les maisons de repos. Et enfin, troisième axe, essentiel: le plaidoyer envers les décideur·ses en vue d’obtenir des actions fortes pour rejoindre les objectifs de l’accord de Paris. Cet axe implique l’interpellation de parlementaires et ministres (notamment en vue des élections de 2024), la participation à des manifestations, des actions, la signature de pétitions ou de mémorandums, voire la participation à des actions de désobéissance civile pacifique.

  • La rencontre

Dominique Lemenu est infirmière enseignante et consultante en pédagogie retraitée et administratrice de GPC. Cécile Honhon a été psychologue dans l’enseignement spécialisé avant de se consacrer à la Ferme du Chant des Cailles à Boitsfort et aux GPC, dont elle a été administratrice. Le fait de devenir grand-parent a été pour elles le déclic de leur engagement.
«Aujourd’hui, on arrive au bout d’un système et on ne parle plus d’urgence climatique, on est dedans ! explique Dominique. La question principale qui nous occupe est celle du discours que l’on transmet aux jeunes. Il s’agit de maintenir l’espoir, tout en restant réalistes, afin que chacun·e s’engage. Nous voulons témoigner de ce que le monde des adultes cherche des solutions et qu’en se mettant en action, on lutte contre l’inquiétude. Dans nos animations dans les écoles, nous tentons de créer ce récit positif car il ne faut pas que les enfants en ressortent sidérés, déprimés, avec l’idée que c’est déjà foutu».
Cécile enchaîne: «L’éducation à la nature est une fameuse piste pour l’avenir. Mais toute notre mobilisation auprès des jeunes n’aura de valeur que si cela bouge au plus haut niveau. A l’âge de la retraite, chacun·e de nous peut profiter de ce moment privilégié pour se poser les bonnes questions, étudier où placer son énergie, poser les choix de ses actions et de ses relations, et donner du bonheur à ses enfants et petits-enfants».
Et Dominique de conclure: «Même si on sent plus vite la fatigue, il faut donner la priorité à ce qui est vraiment important pour soi. Et aller s’investir dans des zones délaissées par les pouvoirs publics afin de remettre de l’humanité dans des services qui doivent être rendus. Aujourd’hui, nos petits-enfants sont fiers de nous, ils participent aux manifs avec nous
».

  • Le conseil: «Engagez-vous, ça fait du bien!»

Plus d'infos: https://gpclimat.be

BRAS DESSUS BRAS DESSOUS
Le voisinage solidaire qui régénère

  • Le projet
Bras dessus Bras dessous

Bras dessus Bras dessous (BDBD) met en contact des personnes de plus de 60 ans, vivant à domicile et exprimant un sentiment de solitude, avec des personnes plus jeunes habitant leur quartier et disposées à donner du temps. Pour les «voisiné·es», ces rencontres hebdomadaires d’une à deux heures visent à rompre leur isolement social, pour un vieillissement harmonieux chez elles. Pour les «voisineur·ses», cet engagement permet de tisser des liens intergénérationnels et, dans certains cas, interculturels.
Ce voisinage solidaire est basé sur la réciprocité et il s’exprime dans des moments de partage: se promener dans les environs, apporter une course ou un colis, s’appeler de temps en temps, partager un thé, s’échanger des recettes ou bricoler. Chacun·e participe en fonction de ses talents, de ses disponibilités et de sa capacité du moment, pour des échanges en toute simplicité et convivialité.
Au départ du projet, un constat et des questions: les personnes âgées qui sont encore en capacité de rester à la maison, comment vivent-elles et qu’est-ce qui les met en lien? Petite initiative de quartier à Forest lors de sa création par Céline Remy en 2015, BDBD s’est vite étendue à plusieurs communes bruxelloises et wallonnes, tant ces réseaux d’entraide ont prouvé leur impact positif sur le bien-être mental et physique des personnes âgées.
S’appuyant sur un réseau local de bénévoles, l’association apporte un accompagnement formel et travaille en partenariat avec une multitude d’acteurs de terrain comme les aides familiales, les pharmacies, les maisons médicales et les assistantes sociales des communes et CPAS afin d’identifier les personnes isolées. Elle organise aussi des moments collectifs comme des goûters, des sorties, des journées à la côte ou encore l’installation d’une caravane dans des quartiers afin de sensibiliser à la question de l’isolement des aîné·es et à la solidarité entre voisin·es.

  • La rencontre

Marianne Massion est chargée de projet chez BDBD et elle met en lien les voisiné·es et les voisineur·ses dans sa commune. Elle se rend au domicile de la personne isolée afin de s’imprégner de son environnement et de ses centres d’intérêt, puis elle établit le matching avec un·e bénévole qui bénéficie d’une formation et d’un encadrement tout au long du duo.
«La solitude peut toucher tout le monde, quel que soit le milieu, explique Marianne. On peut très vite se sentir seul, moins en santé, isolé, et ne plus sortir de chez soi. Les visites régulières du bénévole «réactivent» la personne et, après, il n’est pas rare de la voir devenir voisineuse à son tour».
A Uccle, Marianne compte une cinquantaine de seniors accompagné·es : «Quand on sait qui est l’autre, on peut mieux veiller sur lui ou sur elle. Nos duos habitent le même quartier pour faciliter les déplacements et les sujets de discussion. Ce sont de vraies relations de voisinage, mais en plus solidaires et intergénérationnelles. Les personnes âgées ont beaucoup à nous apprendre, les rencontrer met en perspective notre propre vieillesse et notre fin de vie, et cela permet aux jeunes d’apprendre le souci de l’autre. Dans ces échanges, il y a toujours cette question: que peut-on s’apporter l’un à l’autre? C’est merveilleux!».
Vieillir, c’est ralentir; c’est aussi accepter de perdre en autonomie, en santé et en relations.
«Certaines personnes vivent la vieillesse péniblement, s’inquiète Marianne. Le monde d’aujourd’hui n’est pas spécialement rigolo, mais il l’est encore moins quand on est âgé, isolé, quand on vit dans l’indigence et qu’on cumule ces difficultés. Pour elles, nous représentons une grande famille car nous prenons soin des autres avec beaucoup de bienveillance. Ceci dit, la vieillesse peut être aussi magnifique. On a plus de sagesse et on peut même la vivre très bien, comme notre Papy Bob de 93 ans qui apprend l’anglais, gère ses photos dans son ordinateur, communique sur Facebook et continue à vivre seul, bien entouré d’un réseau de solidarité».

  • Le conseil: «N’ayez pas peur de vieillir, partagez ce qui vous anime!»

Plus d'infos: https://www.brasdessusbrasdessous.be

DUO FOR A JOB
Le coaching intergénérationnel vitalisant

  • Le projet
Duo for a Job

Chez Duo for a Job, il y a les «mentors» et les «mentees». L’association met en contact des personnes de plus de 50 ans désireuses de partager bénévolement leur expérience professionnelle et humaine avec des jeunes en recherche d’emploi, de moins de 30 ans et d’origine non européenne. L’accompagnement individuel, personnalisé, dure six mois, à raison de trois heures par semaine, mais dans la pratique, le/la mentor se rend souvent disponible à tout moment car son investissement est maximal pour assurer la réussite de son coaching. Une convention morale est signée, chacune des parties s’engageant à mobiliser son énergie avec rigueur et régularité, afin de définir un projet professionnel et de le faire aboutir.
Partant du double constat que les jeunes issus de l’immigration sont davantage victimes de discrimination à l’emploi et que les seniors sont vite en perte de repères et de reconnaissance sociale après leur vie professionnelle, Duo for a Job a décidé de lutter contre les stéréotypes en leur offrant une plateforme de rencontre. Grâce à ces relations de confiance dans la durée, elle favorise l’égalité des chances sur le marché de l’emploi, elle valorise l’expérience des aîné·es et elle contribue à une société plus inclusive, tolérante, juste et solidaire.
Bruxelloise à l’origine, l’association a essaimé dans 17 villes belges, françaises et hollandaises. Elle compte 80 collaborateurs, plus de 1800 mentors et, en dix ans d’activité, elle a créé plus de 6000 duos. Son taux de réussite est élevé: dans 75% des cas, le/la mentee décroche, au cours des six mois d’accompagnement ou durant l’année suivante, soit un emploi rémunéré, soit un stage, soit une formation qualifiante avec un emploi à la clé. Et, autre preuve de son succès: 9 mentors sur 10 renouvellent l’expérience!

  • La rencontre

Alec de Laminne est un ancien responsable juridique d’une grande société d’auditorat et il s’est reconverti au coaching intergénérationnel après la retraite. Malgré les sollicitations de son important réseau professionnel, Alec préférait «mettre les mains dans le cambouis» et approcher des situations de vie réelles. Mais faut-il des talents particuliers pour devenir mentor? «Chez Duo for a Job, nous recevons une solide formation de départ, nous partageons régulièrement des intervisions avec l’équipe durant notre duo et nous devons simplement faire preuve de bons sens et de bon cœur. Il faudrait être un gangster pour que le mentee s’en sorte moins bien après qu’avant! Même si nous sommes amenés à sortir de notre domaine de compétences, les jeunes que nous coachons vivent autrement en dehors de leur zone de confort quand ils arrivent d’Erythrée, du Pérou ou de Guinée. Tous les parcours sont différents et nous devons déployer des talents d’écoute et de créativité pour les aider à acquérir leur autonomie dans notre jungle».
Le principe est d’aider l’autre à trouver son indépendance, non d’agir à sa place: «Tu tiens la plume et je peux te donner de l’encre, scande Alec. Ces personnes ont un parcours de vie difficile et le duo est un chemin extraordinaire où l’on arrive parfois à des carrefours, où l’on peut constater des points faibles ou des baisses de motivation. Notre job est d’aller chercher en elles cet extraordinaire, cette force et ce courage qui les ont portées jusqu’ici et qui sont le levier de leur futur emploi. En tant que mentor, je sors enrichi de chaque expérience. C’est terriblement vitalisant!»
Depuis sa rencontre au tout début du projet avec les deux jeunes fondateurs, dont il souligne le charisme, le dynamisme et le professionnalisme exceptionnels, Alec a déjà enchaîné dix duos: «Année après année, j’accuse un an de plus mais les jeunes ont toujours moins de 30 ans et l’écart générationnel se creuse! Un duo, c’est une relation intense et éminemment interculturelle. A chaque fois, de cette rencontre de deux personnes qui n’avaient rien à voir l’une avec l’autre, il éclôt une fleur magnifique

  • Le conseil: «Mouillez votre chemise pour quelqu’un d’autre!»

Plus d'infos: https://www.duoforajob.be/fr/accueil

CROIX-ROUGE DE BELGIQUE    
La passion du secourisme

  • Le projet
Croix Rouge

Guidée par ses principes d’humanité et d’impartialité, la Croix-Rouge entend porter secours à toute personne en souffrance, sans aucune considération de nationalité, d’ethnie, de religion, de condition sociale ou d’appartenance politique. Auxiliaire des pouvoirs publics dans les pays où elle est implantée, elle agit cependant en toute neutralité afin de conserver son autonomie d’action. Son projet repose essentiellement sur le volontariat, notamment pour l’aide aux personnes en difficulté comme l’aide alimentaire ou les visites aux personnes isolées.
En Belgique, la Croix-Rouge est également réputée pour son service 112. Ce service ambulancier emploie une trentaine de personnes salariées et il compte sur l’appui de 120 bénévoles pour le transport de patient·es et les interventions de secours, assurant des missions de prise en charge, premiers soins et accompagnement en ambulance. Les bénévoles s’engagent à effectuer au minimum une garde par mois et à être mobilisé·es dans les dispositifs préventifs de grande envergure ou en cas de situations d’urgence d’exception comme les inondations ou les actes terroristes. Tout en ayant une très bonne condition physique, ces personnes doivent disposer d’excellentes capacités relationnelles et être capables de réagir adéquatement et dans le calme face à l’urgence.

  • La rencontre

Jean-François Calloud est, en principe, à la retraite depuis novembre 2022. Mais il cumule l’équivalent de deux emplois à temps plein: l’un, rémunéré, dans l’organisation des grands événements de la Ville de Bruxelles et l’autre, bénévole, en tant que responsable des services de secours de la Croix-Rouge de Bruxelles-Capitale. Il ne quitterait pour rien au monde ces deux activités, et certainement pas celle à la Croix-Rouge à laquelle il est profondément attaché depuis 35 ans.
Avec enthousiasme, Jean-François décrit son engagement: «J’ai toujours été passionné par les services de secours et je ne me voyais pas travailler exclusivement dans des activités rémunératrices. Avec mon ancien statut d’indépendant, j’avais la liberté de temps, de moyens et de mouvements pour m’investir parallèlement dans le non-marchand. Grâce à ma famille qui a respecté et soutenu mon engagement toutes ces années, je suis parvenu à un équilibre, à un certain bien-être. Dans le secteur marchand, on est toujours dans la performance, la compétition, le stress. Dans le non-marchand, il peut y avoir des objectifs de développement et des budgets à maintenir en équilibre, mais il n’y a pas cette pression! J’y noue des liens très forts et j’y trouve la reconnaissance du travail fourni puisque la Croix-Rouge arrive en tête lorsque l’on évoque les services d’urgence».
Cet investissement gratuit et désintéressé lui donne toute liberté de fonctionnement et de parole, qu’il exerce lors des réunions de coordination préparatoires aux grandes manifestations comme les 20 km de Bruxelles, les grands matchs de football ou les festivals de musique. Il se dit même passeur de messages, en toute bienveillance. Il est vrai qu’il a de l’humour à revendre et un sens certain de la répartie et du contact humain: «Dans le milieu du travail, en raison de stéréotypes bien ancrés et de considérations âgistes, une personne mûre doit déployer beaucoup plus d’énergie pour trouver et conserver sa place et se faire respecter, même si elle a énormément à transmettre aux plus jeunes. Dans l’humanitaire, les questions de l’âge ne se posent pas, même pour la conduite d’une ambulance! Il y a de la place pour les personnes âgées dans cette société, pour autant qu’elles adoptent une bonne hygiène de vie, qu’elles restent actives et qu’elles aient l’ambition de participer à un projet. On peut continuer à progresser et rire à tout âge. D’ailleurs la vieillesse n’existe pas, je ne la vois pas!»

  • Le conseil: «Levez-vous, l’énergie donne de l’énergie!»

Plus d'infos: https://volontariat.croix-rouge.be/sauver-des-vies/ambulancier-e-benevole-amu/

cover Eduquer 179

juin 2023

éduquer

179

Du même numéro

Amitié

Dernière chronique (inter)culturelle avant la prochaine: «Un ami, c’est quelqu’un qui vous connaît bien et qui vous aime quand même» – Hervé Lauwick

Cette chronique nait de l’écoute d’une longue interview de Geoffroy de Lagasnerie, puis de la lecture de son merveilleux dernier essai, 3. Une aspiration au dehors. Eloge de l’amitié, dans lequel le s...
Lire l'article
Photo de Ekaterina Shakharova sur Unsplash grand-parents

Bien vieillir

Un récent sondage effectué pour le compte de la Fondation Roi Baudouin  nous apprend qu’une majorité de personnes de plus de 60 ans craint avant tout la perte de l’autonomie (en moyenne, 6,3 personnes...
Lire l'article

Articles similaires