La Turbean à l’ULB: une cantine durable et engagée

Lundi 3 avril 2023

La Turbean © Gaelle Henkens
La Turbean © Gaelle Henkens
Marie-Francoise Holemans, secteur communication Ligue de l'Enseignement

Projet inspirant labellisé par Good Food Brussels, la cantine durable située à l’ULB fournit aux étudiants des repas sains, savoureux et accessibles. Avec sérieux, mais non dénuée d’humour, elle accompagne la communauté étudiante vers la transition alimentaire.

Située sur le campus du Solbosch à l’Université libre de Bruxelles, la Turbean est une cantine dédiée à l’alimentation durable. Elle a été créée par As Bean, une asbl composée d’ancien·nes étudiant·es en agronomie de l’ULB, soucieux et soucieuses de l’impact de notre alimentation sur la biodiversité et le climat, sur les inégalités sociales et sur la santé. Trois bioingénieur·es et un cuistot se sont fixé un seul objectif, mais de taille: faciliter la transition alimentaire chez les étudiant·es.

La Turbean

Comment interpeller les jeunes sur ces sujets et ces enjeux ? En développant deux pôles, comme l’explique Arthur Dielens, initiateur du projet: «D’une part, on propose aux étudiant·es une offre d’alimentation durable, au même prix qu’une cantine industrielle et dans un périmètre proche puisqu’elle est située au cœur de leur université. D’autre part, nous voulons attirer leur attention sur les enjeux et les rendre plus compréhensibles, à l’aide d’une série d’outils adaptés et largement diffusés sur les réseaux sociaux».

Plat unique, local et de saison

En proposant chaque midi un plat du jour unique, improvisé en fonction des légumes de saison et locaux, la Turbean se présente comme une alternative aux cantines industrielles qui n’ont cependant pas disparu du Solbosch. Afin de garantir un prix juste pour les étudiant·es comme pour les producteurs et productrices, elle valorise les protéines végétales. «Pour la somme de 4,6 € par repas, nous offrons une alimentation variée et de qualité à un prix comparable à l’industriel, affirme Arthur Dielens. Pour nous, il est important de soutenir les filières durables. Certain·es paysan·nes qui nous livrent viennent même discuter en cuisine. Nous servons de bons produits de chez nous, frais et préparés le jour même. Les cuistots y mettent de l’amour et ça se goûte!»

As Bean

La formule a du succès. Après une phase test de trois mois sous une tonnelle dans l’avenue principale de l’Université, celle-ci a mis des locaux à disposition et la cantine a ouvert – puis directement fermé – deux jours avant le confinement. Elle n’a vraiment pu prendre son envol qu’à la rentrée académique de septembre 2021. «En un an et demi d’activité, la Turbean est passée de 150 à 250 repas par jour, poursuit Arthur Dielens. Il n’est pas rare d’être sold out dès 13 heures! Mais la Turbean, c’est aussi un bar-café agréable où se poser pendant la journée. On y déguste des bières locales, des cafés éthiques, des cookies maison, on y croise toute la communauté universitaire et même d’au-delà».

L’attention pointée sur les enjeux

La cantine est avant tout un espace de sociabilisation et la déco y est pour beaucoup dans l’ambiance décontractée du lieu: palettes en bois, plantes vertes, vélos aux murs, espace lecture et… quelques affiches qui rappellent l’engagement du projet. Car la Turbean sert aussi d’espace de diffusion d’informations et de sensibilisation sur les enjeux des systèmes alimentaires: conférences, activités culturelles ancrées dans le milieu étudiant, mobilisations, ateliers de cuisine durable à l’arrache, livres de référence, flyers d’autres associations impliquées dans l’alimentation durable.

As Bean manifestation

Au rayon lecture, Arthur Dielens désigne les trois BD éditées par As Bean: «Nos BD, qui sont le fruit d’un long travail de réflexion et de vulgarisation, et qui sont disponibles gratuitement sur internet, invitent les jeunes à s’intéresser à l’impact du système alimentaire industriel. Volontairement, nos BD ne sont pas moralisatrices. On ne choisit pas d’être influencé·e par la pub et d’avoir hérité d’un paysage alimentaire dominé par l’agroindustrie. L’objectif est donner un point de vue systémique et politique sur l’alimentation. Si les jeunes mangent mal aujourd’hui, c’est parce que les fast-foods et la nourriture agroindustrielle sont arrivés dans et aux abords des écoles, ce qui a fondamentalement modifié les habitudes alimentaires. En culpabilisant les jeunes, on se trompe de cible!»

Promouvoir les filières durables

Ces dernières semaines, As Bean diffuse des posts sur les réseaux sociaux (disponibles sur Instagram, Facebook et LinkedIn) afin d’offrir une vision à 360° sur les systèmes alimentaires: concepts clés, enjeux, menaces, leviers d’action principaux et alternatives existantes. Informer pour mieux comprendre et agir, dans des formats accessibles à un public pas nécessairement averti mais intéressé et curieux. Qu’il soit jeune ou plus âgé d’ailleurs. Parallèlement à la création de contenu de sensibilisation, As Bean participe au groupe de réflexion sur l’accès à l’alimentation via la Sécurité sociale de l’alimentation, un projet qui vise à la fois la justice sociale et la transition agroécologique (voir notre interview page XX).

Et Arthur Dielens de conclure: «Des initiatives comme la nôtre servent à soutenir des filières durables, paysannes, locales et bio, et à rendre la plus accessible possible une alimentation de qualité à un public qui dispose de peu de moyens. En effet, la dimension sociale est à la base de notre projet, du côté de la production comme de la consommation. Nous voulions fixer un prix équivalent aux cantines industrielles en intégrant les coûts sociaux et écologiques, ce que nos concurrentes ne font pas. Pour ce faire, nous réduisons nos coûts en cuisinant quasi uniquement avec des ingrédients végétaux, en achetant en circuit court et en préparant un plat unique de saison, en grande quantité. Mais si notre cantine plait à notre communauté étudiante et intéresse des personnalités politiques, nous ne restons qu’une alternative insignifiante pour l’énorme secteur de la restauration collective. L’enjeu est de sortir de notre niche d’alternative locale pour un changement plus large. La responsabilité se situe à une tout autre échelle, celle du politique».

Plus d’infos:
www.instagram.com/laturbean/
www.asbean.be

La Turbean © Gaelle Henkens
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