Le droit de s’opposer

Jeudi 10 avril 2025

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Patrick Hullebroeck, Directeur

Le régime démocratique a ceci de particulier qu’il intègre, dans son fonctionnement ordinaire, l’expression de l’opposition à la politique menée par les gouvernements. Non qu’il s’agisse d’empêcher les gouvernants légitimes d’agir, mais parce que l’expression pacifique des désaccords participe en démocratie  du processus décisionnel et contribue à la formation de l’opinion publique.

La bonne santé d’un État démocratique se traduit par l’existence d’organes de contrôle et de surveillance qui ont une garantie d’indépendance suffisante pour pouvoir critiquer, contester, voire annuler des décisions, des législations ou des politiques gouvernementales. Ainsi d’une Cour constitutionnelle ou, en Belgique, de la Cour des comptes par exemple.

Un État démocratique dispose, en son sein ou sous une forme parastatale, d’organes à caractère public, chargés de la protection des citoyens – cette protection pouvant les conduire à s’opposer à des actes posés par des autorités publiques ou relevant de personnes privées. Ainsi en est-il du Centre interfédéral indépendant UNIA qui lutte contre les discriminations (liées au genre, à la race, aux convictions, au handicap) ou de la Direction de l’égalité des chances au sein du ministère de la Fédération Wallonie-Bruxelles (FWB).

La vitalité d’une société démocratique conduit aussi à des législations qui visent, par exemple, «l'analyse critique de la société, la stimulation d'initiatives démocratiques et collectives, le développement de la citoyenneté active et l'exercice des droits civils et politiques, sociaux, économiques, culturels et environnementaux», comme dans le décret de l’éducation permanente de la FWB qui soutient l’action des associations comme la Ligue.

Il est vrai, la fonction critique dans la société est souvent assumée par les associations et c’est en cohérence avec son caractère démocratique que la Belgique prévoit, dans l’article 27 de sa Constitution, le droit des Belges de s’associer et l’interdiction de toute mesure préventive qui limiterait l’exercice de ce droit.

Les régimes ou les gouvernants qui cherchent à limiter le droit de s’opposer et de critiquer s’éloignent de l’esprit démocratique et subvertissent la nature même de la démocratie. Il faut s’en inquiéter.

Patrick Hullebroeck, directeur

Couverture de la revue Eduquer 193

Avr 2025

éduquer

193

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