Ils ne mouraient pas tous mais tous étaient frappés (Jean de la Fontaine, Les animaux malades de la peste)
Mardi 31 mars 2020
«… le mot… résonnait encore dans la pièce: la peste. Le mot ne contenait pas seulement ce que la science voulait bien y mettre, mais une longue suite d’images extraordinaires…, les vieilles images du fléau. Athènes empestée et désertée par les oiseaux, les villes chinoises remplies d’agonisants silencieux, les bagnards de Marseille empilant dans des trous les corps dégoulinants, la construction en Provence du grand mur qui devait arrêter le vent furieux de la peste. Jaffa et ses hideux mendiants, les lits humides et pourris collés à la terre battue de l’hôpital de Constantinople, les malades tirés avec des crochets, le carnaval des médecins masqués pendant la Peste noire, les accouplements des vivants dans les cimetières de Milan, les charrettes des morts dans Londres épouvanté, et les nuits et les jours remplis partout et toujours du cri interminable des hommes.» (CAMUS, La peste, p. 52)
La pandémie1 qui frappe en ce moment la planète est très loin d’être la première. L’histoire a conservé le souvenir de nombreuses épidémies devant lesquelles les hommes étaient impuissants et n’avaient que deux recours pour y mettre un terme: la quarantaine et l’immunisation généralisée de la population, c’est-à-dire que l’épidémie prenait fin lorsque, de tous les individus d’une ville, d’une région ou d’un pays, seuls les plus «forts», désormais immunisés, avaient survécu.
Comment expliquait-on avant la découverte des micro-organismes ces maladies infectieuses?
Jusqu’aux travaux de Louis Pasteur (1822-1895) et de Robert Koch (1843-1910), on ignorait tout de la manière dont elles se transmettaient. Outre les explications faisant appel à des sanctions divines ou des maléfices surnaturels (Fig. 1), les médecins professaient la «théorie des miasmes» (du grec miasma2 «souillure») qui remontait à l’Antiquité gréco-romaine (Hippocrate et Galien). C’est en respirant des «émanations malsaines», un air putride et vicié, des miasmes, que l’homme attrapait la fièvre et des maladies contagieuses.
Afin de se protéger, les médecins, dès le XVIIe siècle, portaient une longue tunique, des gants, des bésicles et un masque pourvu d’un long bec d’oiseau renfermant des épices, des fleurs séchées pour couvrir l’odeur pestilentielle des mourants, les miasmes (Fig. 2).
Ils étaient munis en outre d’une baguette qui permettait d’examiner les malades sans les toucher. Cette théorie avait encore cours à Londres en 1850 pour expliquer une épidémie dévastatrice de peste. D’autres médecins, plus fantaisistes, prétendaient que le responsable était un venin, ou encore un insecte ailé invisible à l’œil nu. Certains médecins contestaient même le caractère contagieux des maladies infectieuses3.
Les grandes épidémies dans l’histoire
Nous nous limiterons à rappeler quelques grandes épidémies, importantes par leur durée et par les dommages qu’elles causèrent. Mais il y en eut quantités qui ne sont parfois que brièvement mentionnées. Ainsi, l’Égypte pharaonique fut, semble-t-il, frappée à plusieurs reprises par des maladies infectieuses. La Bible fait également allusion à des épidémies mais dans tous ces cas, les informations sont très lacunaires.
L’épidémie d’Athènes au Ve siècle avant notre ère4Une des premières grandes épidémies à propos de laquelle nous sommes relativement bien informés est celle décrite par Thucydide, l’historien de la guerre dite du Péloponnèse entre Sparte et Athènes. Elle frappa la cité-état athénienne de 430 à 426 avant notre ère5. Il ressort d’ailleurs des observations et des descriptions que Thucydide a faites, qu’il s’agirait non d’une épidémie de peste comme on l’a cru longtemps mais plutôt de typhus ou de la fièvre typhoïde. Très dévastatrice, elle emporta un quart de la population de l’Attique. Parmi les victimes, il y eut l’homme politique Périclès.
«La peste antonine» décrite par Galien au IIe siècle après J.C
Elle prit naissance en Mésopotamie (Irak aujourd’hui) en 165 sous le règne de Marc Aurèle; de là, sans doute transmise par les légionnaires romains, elle gagna le Proche-Orient, Rome et tout l’empire en quelques mois. Elle dura jusqu’en 180 et fut décrite par Galien de Pergame (129-201) dont les écrits, comme ceux d’Hippocrate de Cos, ont fait autorité jusqu’au XVIIIe siècle. Ses descriptions des éruptions cutanées et des symptômes de la maladie (fièvre, diarrhée, vomissements, selles noires…) sont typiques de la variole et non de la peste. C’est sans doute la première épidémie de variole attestée par des écrits en Occident6.
La peste qui frappa l’Empire romain, l’une des plus meurtrières
Au VIe siècle, une pandémie de peste frappa l’Empire romain d’Orient ou byzantin pendant le règne de Justinien (vers 482-565). Elle débute en 541 et a sévi durant trois siècles (jusqu’en 767 environ): Turquie (Constantinople), Proche-Orient, Égypte et Italie (à Rome, le pape Pélage II en meurt en 590). La pandémie a été suivie de nombreux retours de la maladie, notamment dans le sud de la France et en Gaule (Arles, Clermont, Marseille), provoquant des pertes humaines estimées de 25 à 50 millions de personnes. Elle est avec la peste noire une des plus meurtrières pandémies connues.
La peste noire
Très contagieuse, cette maladie fut sans conteste une des plus graves catastrophes de l’Occident chrétien; le mot «Peste» (du latin pestis épidémie, fléau) désignait au Moyen Âge toute maladie contagieuse, caractérisée par une très forte mortalité (choléra, diphtérie, typhus, fièvre jaune…). Le fléau a tellement marqué les esprits que le mot a pris un sens figuré dans des formules d’imprécations, de malédictions (Que la peste te crève - La peste soit de l’avarice et des avaricieux), dans des interjections (Peste! c’est du chambertin!) ou pour désigner des personnes ou des choses nuisibles et pernicieuses (empester, pestiféré) à éviter à tout prix (voir aujourd’hui l’expression «la peste brune» pour parler du nazisme). Le mot sert également à désigner des maladies à forte morbidité dans le monde animal qui n’ont rien à voir avec la peste humaine.
Très contagieuse, cette maladie (la peste) fut sans conteste une des plus graves catastrophes de l’Occident chrétien... Le fléau a tellement marqué les esprits que le mot a pris un sens figuré dans des formules d’imprécations, de malédictions.
Elle est transmise à l’homme par une bactérie (et non un virus) provenant de morsures de puces portées par des rats. Ce bacille, Yersinia Pestis, qui porte le nom de son inventeur en 1894, le français Alexander Yersin (1863-1943), peut être combattu par des antibiotiques7. On distingue plusieurs types de peste: la peste pulmonaire, la peste septicémique et la peste bubonique. Celle-ci présente comme symptômes une inflammation des ganglions appelés bubons qui prennent un caractère noirâtre - d’où l’appellation peste noire - et suppurent du sang et du pus. Le malade a en outre des maux de tête, des frissons, des vertiges. Il décède en moyenne 48 heures après avoir été infecté mais des guérisons sont possibles.
La grande peste noire apparaît pour la première fois à Marseille en 1347. Des études semblent accréditer l’hypothèse que la maladie serait née en Chine vers 1333 et se serait répandue à travers l’Asie en suivant les voies commerciales, notamment la route de la soie qui passe par Samarkand, Bagdad, Damas, et les diverses routes maritimes suivies par les pèlerins musulmans qui se rendaient à la Mecque. En 1346, la peste est attestée à Caffa8, colonie génoise en Crimée où des marins contractèrent la maladie et la transmirent en Sicile, puis en Toscane et ensuite à Marseille. Elle va se répandre en quelques années à travers toute l’Europe, jusqu’en Angleterre, en Allemagne et dans les pays scandinaves. On estime que la pandémie a été responsable de la mort de 25 millions d’individus sur les 75 millions que comptait l’Europe au XIVe siècle. Toutes les régions ne furent cependant pas atteintes de la même manière. Les villes le furent davantage que les campagnes; dans les villes, les quartiers pauvres où les densités humaines étaient plus fortes et l’hygiène plus élémentaire, furent plus atteints que les quartiers où vivait la bourgeoisie. Dans les campagnes, les régions montagneuses, les régions isolées furent moins touchées par le fléau.
La phase critique de l’épidémie prit fin en 1352 mais il y eut dans les années et les siècles qui suivirent de nombreux retours de la peste dans diverses régions et villes européennes: par exemple Paris fut touchée en 1428, 1437, 1499, 1522, 1531, 1544; Nantes en 1484, 1522, 1529, 1583, 1625; Arles en 1398, 1450, 1482, 1629, etc. Ces retours de la peste ont installé une psychose qui a marqué les générations pendant des siècles et les conséquences sur la société médiévales furent multiples9.
Elle survient à une époque où la population, à 95% paysanne, parvient de plus en plus difficilement à équilibrer production alimentaire (surtout céréalière) et la demande. Ce déficit dans la production, sans doute explicable par des conditions climatiques et les guerres10, est la cause d’un affaiblissement des organismes et une résistance par conséquent, moins grande aux maladies. Ceci peut justifier une mortalité élevée dans certaines contrées et villes. La peste fut aussi à l’origine de désordres sociaux et d’une opposition plus tendue entre les classes sociales, d’un refuge dans la religion, d’un accroissement de l’angoisse face à la mort qui transparaît notamment dans l’art (représentations de Danses macabres (Fig 3), des quatre chevaliers de l’Apocalypse).
S’installe aussi une méfiance vis-à-vis de l’Église et de sa hiérarchie (évêques et archevêques) davantage préservée.
La peste fut aussi à l’origine de désordres sociaux et d’une opposition plus tendue entre les classes sociales, d’un refuge dans la religion, d’un accroissement de l’angoisse face à la mort qui transparaît notamment dans l’art.
Cette méfiance s’accentuera au cours du XVe siècle et annonce la Réforme protestante du XVIe siècle. L’angoisse que suscite la pandémie invite à trouver des explications fantaisistes et superstitieuses comme celle d’une comète qui aurait empoisonné l’air. Des juifs, rendus responsables et accusés d’avoir empoisonné les puits sont massacrés dans des pogromes. D’un point de vue démographique, des régions sont dévastées mais la disparition des habitant·e·s est à l’origine d’une redistribution des richesses et des héritages qui a permis une meilleure alimentation des survivant·e·s. On observe d’ailleurs que dans les années qui suivirent la peste noire, les taux de nuptialité et de natalité se sont élevés car la nouvelle répartition des richesses a supprimé les obstacles financiers aux mariages (notamment les paiements des dots). Ainsi, les pertes en vies humaines dues à la pandémie ont pu être partiellement comblées. Au total, la peste noire est co-responsable avec les guerres et les pillages dus aux bandes de mercenaires et de hors-la-loi, d’un arrêt de l’expansion démographique et de troubles économiques pendant tout le XIVe siècle. Il faut attendre le milieu du XVe siècle pour constater une reprise économique en Italie, notamment à Florence où s’amorce le mouvement de la Renaissance. Elle est un peu plus tardive en Angleterre (dernier quart du XVe siècle) et en France (XVe-XVIe siècle).
Exemple d’un retour de la peste en France: l’épidémie de 1720-1722 en Provence11
Le 25 mai 1720, le Grand Saint-Antoine, un trois-mâts commandé par Jean-Baptiste Chataud, entrait dans le port de Marseille en provenance du Proche-Orient. Muni d’une patente nette12, il était chargé de soieries destinées à la foire de juillet à Beaucaire; la cargaison, qui appartenait à plusieurs notables de la ville, représentait une forte valeur marchande. à Chypre, le capitaine avait dû faire enterrer un marin mort subitement. D’autres décès avaient suivi dans les jours suivants. à Livourne, où le Grand Saint-Antoine avait été refoulé à cause d’une suspicion de peste, le médecin et le chirurgien n’avaient cependant pas reconnu la peste qui avait frappé trois autres matelots. à son arrivée à Marseille, le capitaine, craignant la présence du fléau à bord, fit mettre son navire et l’équipage en quarantaine dans l’île de Pomègues, à une vingtaine de minutes de navigation du vieux port. Un nouveau décès survint mais, pas plus que son collègue italien, le chirurgien de Marseille ne reconnut les symptômes de la peste: le cadavre ne portait pas les bubons caractéristiques. Le trois-mâts était à l’ancre depuis une dizaine de jours lorsque, le 4 juin, l’armateur, qui était aussi un échevin de la ville, et les propriétaires de la cargaison de soieries, commencèrent à s’impatienter. La foire commerciale de Beaucaire était en effet proche et il ne fallait pas la manquer. Le Bureau de Santé de la ville13, composé d’intendants chargés de décider s’il y avait lieu de déclarer de poursuivre ou d’écourter la quarantaine, admit finalement l’installation des passagers et le dépôt des marchandises dans les infirmeries construites dans les années 1660 à Saint-Marcel d’Arenc. Fort de la patente nette ainsi que de l’avis du chirurgien, l’échevin mit alors fin prématurément à la quarantaine.
L’épidémie ne tarda pas à se déclarer. Mais il faudra un mois pour qu’elle soit reconnue officiellement. Les échevins ordonnèrent à ce moment aux miséreux de la ville de la quitter sous 24h. Ce qui ne fit qu’augmenter la propagation de l’épidémie dans les environs de Marseille où les premiers décès furent annoncés le 22 juin 1720. Le navire, placé à nouveau en quarantaine le 27 juin dans l’île du Jarre, au sud de la cité phocéenne fut brûlé en septembre quelques mois plus tard14. Le 31 juillet le Parlement de Provence prit l’affaire en mains et décida d’isoler Marseille. Le capitaine Chataud fut déclaré responsable et emprisonné dans le Château d’If où il séjourna deux ans.
Rapidement l’épidémie s’étendit et atteignit en quelques semaines Apt et Carpentras où on exposa les reliques de Saint-Siffrein et de Saint-Cloud pour éloigner le fléau. Pour lutter contre l’épidémie qui ne faisait que s’étendre, le Conseil du roi interdit toute relation commerciale avec les ports de Provence; les fêtes de carnaval en février 1721 furent supprimées; Avignon, atteinte par la peste fut mise en quarantaine en septembre 1721. On établit des cordons sanitaires sous forme de fossés et de mur de pièces sèches. Mais c’était l’époque des vendanges; les raisins ne pouvaient attendre. Les habitant·e·s des villages, qui se déplaçaient de vigne en vigne pour la récolte, devaient se munir d’un «billet ou patente de santé». Immanquablement, ces déplacements permettaient à la peste de se propager. La peste a sévi pendant toute l’année 1722 jusqu’en janvier 1723, moment où le Bureau de Santé put lever les mesures de protection. Le bilan humain, après deux années d’épidémie, s’avéra être très lourd. On évalue le nombre de décès dans la ville de Marseille à 30.000-35.000 sur une population de 90.000 habitant·e·s auxquels il faut ajouter 40 à 50.000 morts sur le territoire touché par le fléau.
Le bilan humain, après deux années d’épidémie, s’avéra être très lourd. On évalue le nombre de décès dans la ville de Marseille à 30.000-35.000 sur une population de 90.000 habitant·e·s auxquels il faut ajouter 40 à 50.000 morts sur le territoire touché par le fléau.
En outre, les conséquences économiques furent importantes pour Marseille dont le port fut fermé pendant toute la durée de l’épidémie. La peste des années 1720-1722, alors que Marseille n’avait plus connu d’épidémie depuis le milieu du XVIe siècle, est aujourd’hui encore présente dans la mémoire collective des Marseillais. Elle fut aussi un sujet d’inspiration pour de nombreux artistes, peintres, sculpteur·trice·s, graveur·se·s et écrivain·e·s (Marcel Pagnol, Le temps des amours, François-René de Chateaubriand, Mémoires d’outre-tombe). Un témoin, Jeanne-Marie Leprince de Beaumont (1711-1780)15, écrivait cette phrase saisissante qui fait écho aux tableaux du peintre local Michel Serre (1658-1733) (Fig. 4): «Les rues, les devants des portes étaient
couverts de malades qui confondus avec les mourants, étaient abandonnés de tout le monde, les hôpitaux ne pouvant plus les contenir. On y rencontrait peu de monde, personne n’osant apparaître dans les rues sans un besoin absolu (…). Heureusement l’évêque de Marseille, accompagné de quelques ecclésiastiques, portaient des secours spirituels et corporels à tous les malades sans distinction de rang».
Les traitements
Ils étaient complètement inefficaces. Convaincus que ces fléaux étaient envoyés par Dieu pour les punir de leurs crimes et du péché originel, les habitant·e·s organisaient des processions et faisaient des dévotions à Dieu, à la Vierge au(x) saint(s) protecteur(s) de la cité. Parfois, le remède avait un caractère pseudo «scientifique». C’est le cas du «vinaigre des quatre voleurs», une macération dans du vinaigre de plantes aromatiques et médicinales à laquelle on attribuait des propriétés antiseptiques. La légende, née peut-être pendant la peste noire à Marseille, raconte que des brigands détroussaient des cadavres de pestiférés sans être atteints par la peste car ils utilisaient ce désinfectant à usage corporel16. Parmi les désinfectants et les médications préconisées, il y avait aussi, entre autres, le vin, la thériaque17 ainsi que les parfums à base de soufre et d’arsenic qui pouvaient avoir quelque efficacité car ils permettaient de tuer les rats et les puces responsables de la maladie. D’autres remèdes traditionnels tout aussi inefficaces étaient utilisés comme la saignée, la sudation et le vomissement. Mais les meilleures protections étaient encore la quarantaine et le confinement; un exemple original fut la construction, dans les monts du Vaucluse, d’un mur long de 27 km édifié pour protéger le comtat Venaissin de la peste qui frappait Marseille en 1720-1722. Assimilable à une fermeture de frontière, le mur était muni de place en place de guérites pour les gardes chargés d’interdire le passage18.
Convaincus que ces fléaux étaient envoyés par Dieu pour les punir de leurs crimes et du péché originel, les habitant·e·s organisaient des processions et faisaient des dévotions à Dieu, à la Vierge au(x) saint(s) protecteur(s) de la cité.
Les épidémies aux XIXe et XXe siècles
Les épidémies et pandémies qui touchent le système digestif (choléra, diarrhées…), celles qui se transmettent de personne à personne par des gouttelettes (grippe, diphtérie, tuberculose), les maladies à transmission sexuelle (sida, syphilis …) ou les maladies transmises par des piqûres ou morsures d’animaux (puces, poux, tiques) comme la peste, la malaria, la fièvre jaune, font partie de l’histoire de l’humanité. Depuis la pandémie de grippe espagnole des années 1919-1920, partie de Chine et responsable de 50 à 100 millions de morts, les pays industrialisés et riches ont été relativement épargnés par rapport aux pays asiatiques (la Chine, l’Inde où le choléra règne de façon endémique), Madagascar, l’Afrique sub-saharienne. Mais comme le rappelait judicieusement «Infovac-France» (la plateforme d’information sur les vaccinations)19, «de nos jours avec les médicaments à disposition, on peut avoir le sentiment d’être à l’abri des grandes épidémies comme celles qui ont endeuillé le passé. C’est une erreur: une hécatombe est toujours possible. Les mouvements incessants des biens et des gens à travers toute la planète en augmentent le risque. D’autant que, dans une impression de sécurité due au fait que les autres se vaccinent, trop de personnes négligent de se vacciner ou de faire vacciner leurs enfants; le taux de vaccination tombe alors sous le seuil qui assure l’immunité collective».
Pol Defosse, historien
1Trois termes désignent l’étendue d’une contagion : on parlera de flambée pour décrire l’apparition soudaine de quelques cas, d’épidémie lorsque la contagion touche une région, un ou plusieurs pays, de pandémie quand le mal atteint un ou plusieurs continents.
2Miasmes ( το μίασμα) : n.m. employés généralement au pluriel.
3www. randomania.fr/le-mur-de-la-peste-barriere-sanitaire/. Consulté le 16 mars 2020.
4Alice GERVAIS, « à propos de la « Peste » d’Athènes : Thucydide et la littérature de l’épidémie » dans Bulletin de l’Association Guillaume Budé : Les Belles Lettres, N° 31, 1972, p. 395-429.
5L’historien Thucydide (vers 465-397) est sans doute influencé par les écrits de son contemporain Hippocrate de Cos (vers 460-377) considéré comme « le père de la médecine ». Il observait et décrivait ce qu’il observait. Il fut lui-même atteint par l’épidémie mais en réchappa.
6www.academie-medecine.fr/la-pesteantonine-2. Consulté le 17 mars 2020.
7La bactérie a été identifiée par des recherches en paléochimie moléculaire sur l’examen d’ossements retrouvés dans un charnier de victimes des épidémies qui ont sévi à Londres en 1660 et à Marseille en 1720.
8Caffa étaient assiégée par les Mongoles qui levèrent le siège à cause de la peste.
9Jacques HEERS, Précis d’histoire du moyen âge, PUF 1968, p. 194-199.
10Le conflit, entrecoupé de trêves, connu sous le nom de guerre de cent ans, qui a opposé deux dynasties, les Plantagenets et les Valois et à travers eux, l’Angleterre à la France, a débuté en 1337. Il prend fin en 1453.
11<fr.wikipedia.org/wiki/Peste_de_Marseille (1720>. Consulté le 18 mars 2020. Article très bien documenté. Abondante bibliographie.
12Marseille, comme toutes les villes portuaires méditerranéennes, était directement exposée aux épidémies à cause de ses relations fréquentes avec le Proche Orient où la peste était présente de façon endémique. Au départ des ports de Turquie, de Syrie et de Palestine, les capitaines des vaisseaux recevaient des consuls de France une patente (ou certificat) dite nette lorsque rien de suspect n’était signalé dans la région ; elle était « brute » lorsque la région était contaminée ou suspecte si un doute régnait. à leur arrivée à destination, les passagers devaient faire une quarantaine de 2 à 3 semaines pour une patente nette et de 4 à 5 semaines pour une patente brute.
13Il était chargé de contrôler les navires entrant dans le port.
14L’épave a pu être fouillée et une partie du mobilier être récupéré.
15Jeanne - Marie LEPRINCE de BEAUMONT, Mémoires de Madame la Baronne de Batteville, Lyon 1766, p. 54.
16Ce «remède» est cité par M. Pagnol (1895-1974) dans un roman posthume Le temps des amours paru en 1977 dans la série «Souvenirs d’enfance».
17La thériaque est une composition d’un mélange de diverses substances d’origine végétale, minérale et animale considérée comme un antidote. Les recettes de la thériaque, en usage jusqu’à la fin du XIXe siècle, étaient très variées. Pour les affections internes, le patient prenait quelques grammes de thériaque délayée dans de l’eau, pour les affections externes elle était prise sous forme de pommade.
18Danièle LARCENA et al., La muraille de la peste dans Les Alpes de Lumière, n° 114, septembre 1993, 84 p. (édition Les Alpes de Lumière et Pierre sèche en Vaucluse www.pierreseche.com/recension_4html consulté le 16 mars 2020.
19Fiche du 17 mars 2020 (www.infovac.ch/fr/faq/les-epidemies). Consulté le 18 mars 2020.
Illustration article: Michel Serre. Marseille. La peste Cours Belsunce. Musée des B.-A. Marseille