Alors que la commission Justice du Parlement fédéral s’apprêtait à revenir sur les propositions de loi des partis de l’opposition afin de sortir l’avortement du code pénal, la majorité se décide à « avancer ». En effet, elle a annoncé ce mardi 3 juillet vouloir déposer une proposition de loi. Avorter ne sera plus un « délit contre l’ordre des familles et de la moralité publique » comme il y figure aujourd'hui au code pénal belge. En revanche, sous certaines conditions, l’IVG restera sanctionnable pénalement... Alors où est l’avancée ? La majorité compte supprimer la notion d’état de détresse exigée jusqu’alors pour recourir légalement à l’avortement, mais c’est à peu près tout. Les femmes ne pourront recourir à l’IVG que dans les 12 premières semaines de grossesse. Rien ne change. Le délai de réflexion reste de 6 jours alors que les experts préconisaient de le réduire à 48 heures. Vive réaction en commission puisque depuis des mois voire des années, nombre de politiques et associations réclamaient une réelle avancée en la matière. Des auditions d’experts avaient eu lieu au mois de juin en commission Justice. L’opposition avait prémâché tout le travail. Un texte existait et ralliait les groupes Défi, PS, SP.A, Ecolo/Groen, PTP et Open VLD, seul parti de la majorité. La proposition prévoyait évidemment de sortir l’IVG du code pénal, mais aussi d’augmenter le délai de pratique à 18 semaines, de réduire le temps de réflexion à 2 jours et de supprimer toute sanction pénale. Mais la majorité a décidé de déposer un texte et de couper court à tous les débats. Car en pratique, il y a beaucoup à parier que c’est ce texte, uniquement, qui fera office de base de discussion, laissant peu de chances à l’opposition de l’amender. Par ailleurs, la majorité en profite pour faire passer la reconnaissance symbolique des fœtus mort-nés avant six mois de grossesse. Le rapprochement entre droit du foetus et IVG est pernicieux et se fait aux dépends des droits des femmes. "L'avancée libérale", dixit Olivier Chastel dans la presse, occulte à peine une volonté de contenter les partenaires catholiques flamands du CD&V et de la NVA.
Zéro avancée pour les femmes
Les réactions de ce mercredi en commission Justice sont très vives. Karine Lalieux (PS) : C’est un chantage de la pire espèce. Ce sont les catholiques et conservateurs du gouvernement qui ont dicté leur loi. Et ce sont les femmes qui sont perdantes. Tous les experts nous ont demandé de diminuer le délai de réflexion, tous ont dit qu’il fallait dépasser les douze semaines. Et personne n’a demandé un statut pour le fœtus ! ». Muriel Gerkens (Ecolo) : « Je trouve cela heurtant, voire malsain de lier les deux. Dans les régimes où l’on veut porter atteinte à l’IVG, une façon indirecte et efficace consiste à intervenir sur le statut du fœtus… »