La Commission nationale pour les droits de l’enfant (CNDE) a élaboré 40 indicateurs nationaux pour mesurer la situation des enfants en Belgique. C’est une exigence du Comité des droits de l’enfant des Nations-Unies qui tente ainsi d’évaluer l’état des droits de l’enfant dans le monde. Les indicateurs passent au peigne fin les droits à la santé, aux loisirs, à la protection de la vie familiale… Neuf d’entre eux concernent le droit à l’enseignement. Si globalement le bulletin est bon, les carences sont connues et persistent d’année en année. Ségrégation, inégalités des acquis, interruption prématurée de la scolarité concernent toujours prioritairement les élèves d’origine étrangère et socialement défavorisés.
Commençons par les bonnes nouvelles : 88% des élèves belges de 15 ans se sentent bien à l’école. C’est mieux qu’en 2003 et c’est vrai dans les trois communautés mais plus en Flandre et en Communauté germanophone que du côté francophone (58% seulement d’élèves « heureux »). Le sentiment de bien-être s’observe davantage chez les filles et les élèves d’origine belge.
Ce constat, a priori rassurant, doit être nuancé. Les élèves sont un peu moins nombreux à se sentir « écoutés par leurs professeurs » (74%) ou « traités avec justice » (79%). Pour ce dernier indicateur, on relève un écart très significatif en Communauté flamande entre les élèves d’origine belge (86% disent être traités avec justice) et les élèves issus de l’immigration (77%). Dans l’enseignement de la Communauté flamande, cette disparité selon l’origine ethnique est récurrente et bien plus présente qu’en Fédération Wallonie- Bruxelles.
L’iniquité est évidement aussi présente dans l’enseignement francophone. La répartition des élèves entre enseignement spécialisé et ordinaire montre des différences notables en fonction de l’indice socio-économique moyen du quartier de résidence des élèves. Les garçons sont beaucoup plus présents (8%) dans l’enseignement spécialisé que les filles (5%). La ségrégation, la concentration d’élèves socio-économiquement défavorisés dans certaines écoles sont très fortes tant en Flandre qu’en FWB (respectivement 39 et 41%). Du côté francophone, on observe par ailleurs une plus grande concentration, dans une même école, d’élèves parlant une langue étrangère à la maison (44% contre 25% en communauté flamande). Mais la plus forte polarisation entre écoles « fortes » et « faibles » s’observe selon les performances en mathématiques (près de 60%) et le constat vaut pour les trois Communautés.
Le rapport de la Commission nationale pour les droits de l’enfant contient beaucoup de chiffres. Mais il est intéressant parfois de noter ceux qui manquent. Le premier indicateur, celui du nombre d’enfants non-scolarisés est interpellant et pourrait se résumer par le constat suivant, celui de l’absence de chiffres fiables. La Commission estime même « qu’aucune donnée nationale ne peut être fournie concernant les enfants non-scolarisés ». Chaque Communauté est compétente pour le contrôle de l’obligation scolaire et dispose donc son propre service. Pour Bruxelles, les Communautés flamande et francophone doivent coopérer pour le contrôle des enfants domiciliés dans la capitale et mettre leurs fichiers en commun, ce qui ne semble pas aller de soi. Par ailleurs, le service chargé du contrôle de l’obligation scolaire dépend de la collaboration des communes de résidence des enfants. Si les communes ne réagissent pas, les dossiers ne sont pas transférés, éventuellement au Parquet. Une enquête réalisée par le Commissariat flamand aux droits de l’enfant indique cependant que la moitié seulement des enfants roms dont le logement se situe sur un terrain privé en Flandre va à l’école.
L’analyse des « interruptions prématurées de scolarité » livre un peu plus de données. Partout, les chiffres sont à la baisse depuis 2000. C’est Bruxelles qui est la région la plus touchée par ce phénomène avec 17,7% d’arrêts de la scolarité contre 7,5% en Flandre. Mais ici encore les statistiques ont leurs limites. La Commission nationale des droits de l’enfant constate n’avoir aucune indication quant aux motivations ou aux facteurs qui peuvent expliquer ces interruptions prématurées de scolarité.
On peut seulement se rappeler que du côté francophone, le nombre d’élèves heureux à l’école n’est finalement pas très élevé.
Martine Vandemeulebroucke, responsable du secteur Communication